Pédagogie

Exemples de transposition didactique en mathématiques

Exemples de transposition didactique en mathématiques

Le concept de transposition didactique a pris sens en didactique des mathématiques grâce surtout aux travaux d’Yves CHEVALLARD. Il définit la transposition didactique comme « le travail qui d’un objet de savoir à enseigner en fait un objet d’enseignement ». Nous envisageons tout d’abord des exemples de transposition didactique en mathématiques. Enfin nous donnons les conséquences de la transposition didactique en didactique des mathématiques :

Exemples de transposition didactique en mathématiques

Considérons l’exercice suivant : 

« Calculer la dérivée de la fonction f(x) = (2x 4 — 3)/(a ; 4-1) 2 — »

On suppose que l’élève mette ici en œuvre la formule

(u/v) » = (u’v — uv »)/v2.

 Dans cette hypothèse, il obtient d’abord :

(*) f {x) = {2 (x + l) 2-2 (2x + S) {x + l))/(x + lf.

La formule employée ne conduit pas plus loin. Ce sont alors les automatismes engendrés par le premier apprentissage du calcul algébrique qui prennent le relais, et conduiront éventuellement l’élève à développer le numérateur [et — pourquoi pas ? – le dénominateur aussi peut être], pour obtenir alors [en écartant toujours toute erreur de calcul] ;

(**) f'[x] = -2 [x2 + 3x + 2]/[x + l] 4.

Imaginons maintenant un autre exercice :

« Déterminer le sens de variation de la fonction f [x] — [2x 4 — 3]/[a ; 4-1] 2. »

lci, l’élève doit calculer la dérivée de la fonction/, non pour elle-même. Mais avec une intention au service de laquelle ce calcul n’est qu’un moyen. Il s’agit pour lui de déterminer le signe de la dérivée.

 Or cette finalisation du calcul va influer — le cas échéant — sur le calcul lui-même, en fournissant un critère de pertinence concernant la forme du résultat obtenu. Et donc aussi les décisions à prendre aux coefs de la conduite du calcul. Si par exemple l’élève procède ainsi qu’on l’a décrit ci-dessus, l’expression de la dérivée obtenue en •[**] n’est pas la plus appropriée et, du point de vue du but poursuivi, le calcul n’est pas termine : il faut encore factoriser le numérateur, afin de déterminer le signe de f'[x].

 Mais en fait il eut été au moins aussi pertinent, en l’espèce, de ne pas céder à l’automatisme de développement, qui induit à passer de [*] a [**.], mais d’opérer dès cette étape une factorisation du numérateur, suivie d’une simplification de la fraction, ou encore de simplifier directement [par x+\] sur la forme brute obtenue en [•*], pour arriver enfin à :

f(x) = [2 (tf+ 1) – 2 (2z + 3)]/[z + l] 3 [***]       = [-2 x – 4]/[z + l] 3

                                   ‘.’= .-2 [i + 2]/[z + l] 3.

Cet exemple permet d’apercevoir deux faits essentiels. D’une part, le premier apprentissage du calcul algébrique se fait dans un cadre formel, et non dans un cadre fonctionnel.

D’autre part, et en conséquence – si du moins l’élève poursuit ses études générales [dans le cadre de l’enseignement du lycée] —, les acquis de ce premier apprentissage seront mis à l’épreuve dans un cadre autre, fonctionnel celui-là, et se trouveront donc retravaillés et remaniés, dès lors que l’élève sera amené à faire usage du calcul algébrique à titre de moyen ou d’outil dans des domaines variés des mathématiques.

Dans cette seconde phase, et au contraire de ce qui se passe dans la première. Il y aura apprentissage sans qu’il y ait à proprement parler enseignement. Sans qu’il y ait intention d’enseigner à l’élève un autre type de rapport au calcul algébrique. [Les enseignants de lycée pensent généralement la mise en œuvre du calcul algébrique que suppose l’enseignement qu’ils donnent comme une simple application d’un savoir déjà constitué et, en conséquence, s’étonneront, ou s’indigneront parfois, de l’inhabileté des élèves à cet égard.]

Une analyse rapide du premier apprentissage du calcul algébrique.

Cet apprentissage se fait dans un cadre « formel ». Or on touche là à une manière de paradoxe : l’apprentissage des aspects formeIs des mathématiques [en l’espèce, du calcul algébrique] ne peut se réaliser que de manière très inadéquate dans un cadre formel

Mais en fait, il n’y a là nul paradoxe. Il s’agit en effet de faire acquérir à l’élève la maitrise de la manipulation formelle des expressions algébriques ; or, comme dans tout domaine soumis à un système de règles — que l’on songe ici à un jeu, les échés —, cette maitrise ne porte pas que sur les règles prises comme schèmes d’action séparés des situations dans lesquelles elles pourront être mises en œuvre. Elle devrait, en son principe — c’est-à-dire par référence à l’usage effectif de ces règles dans le cadre de la pratique mathématique —, porter tout autant sur la maîtrise de l’emploi pertinent, fonctionnel, des règles formelles dont « apprentissage » est visé. C’est un premier aspect, que nous avons déjà souligné plus haut, et sur lequel on ne saurait trop insister.

En réalité le calcul formel qui constitue le support du premier apprentissage du calcul algébrique suppose de toute façon un cadre de référence.

À défaut d’un cadre explicite fournissant un guide à la conduite du calcul. Et par rapport auquel le calcul algébrique apparaitrait comme un outil aux emplois divers, il existe bien un cadre de référence, mais qui demeure implicite : ce cadre — depuis longtemps familier à l’élève — est celui du calcul arithmétique, qui va fonctionner alors comme un véritable paradigme. Or si l’on peut bien considérer que les règles du calcul algébrique sont l’expression des propriétés des opérations arithmétiques, le fonctionnement de ces règles en calcul algébrique n’est pas superposable à leur fonctionnement arithmétique.

En arithmétique en effet, tout calcul opère constamment en simplification, soit à complexité ostensive décroissante : on y verra par exemple fonctionner la transformation 2 4 — 3 — 5, jamais la transformation inverse, 5 = 24-3. Or il en va tout autrement en calcul algébrique. D’une part, l’objectif de simplification des expressions algébriques suppose fréquemment, à titre d’intermédiaire, une complexification [c.-à-d. une factorisation] préalable : ainsi afin de simplifier la fraction

[x3 — Sx2 + x — S]/[x2 — x — 6],

devra-t-on d’abord observer que l’on a [par exemple]

x3 — Sx2 4 — x – 3 •= x [x2 + 1] – 3 [x2 + 1] = [x – 3] [x2 + 1]

et x2 — x-6= [x-3] [Ì4-2]. ‘

D’autre part, c’est en bien des cas une complexification qui apparait pertinente. Considérons ainsi l’expression

[2x 4 — 3]/[z 4-1] 2 2/x.

L’habitus « arithmétique » poussera ici l’élève, à qui serait demandé sans plus de « calculer cette expression », à la traiter comme il le ferait d’une différence de deux fractions numériques :

[2x 4 — d]/[x + l] 2 2/x =• [(2x2 4 — 3rr) – 2 {x + l] 2)/x (x 4-1) 2

= – (x + 2)/x (x + l) 2.

Mais si l’expression en question représente une fonction dont il s’agirait de déterminer une primitive, le calcul devient fonctionnel, et la conduite du calcul n’est plus dès lors déterminée par une consigne formelle générale. On sait en effet que l’objectif pertinent à assigner au calcul est, dans l’exemple examiné, celui d’aboutir à une forme complexifiée particulière de l’expression donnée — sa décomposition en « éléments simples » :

(2x + 3)/(z 4-1) 2 2/x = 2/(x + 1) + l/(x 4-1) 2 2/x.

LA TRANSPOSITION DIDACTIQUE EN DIDACTIQUE DES MATHÉMATIQUES.

Trois conséquences découlent de la transposition didactique :

une dépersonnalisation du savoir

Cette dépersonnalisation du savoir, Yves CHEVALLARD conclut que l’enseignant en a besoin pour être crédible. C’est comme si pour pouvoir être partagée une connaissance avait besoin d’être rendue anonyme.

Notons qu’en biologie il en va de même. Il suffira de feuilleter un ouvrage scolaire pour s’apercevoir que le savoir est rarement personnalisé. Ainsi, dans deux des trois ouvrages les plus utilisés en terminale D, la biosynthèse des protéines est développée sans qu’un seul nom de chercheur soit cité. Messieurs Jacob, Monod et Lwoff n’apparaissent pas. Et l’on pourrait renouveler cette observation pour de nombreux chapitres.

La remarque d’Y. Chevallard pourrait ainsi facilement s’actualiser en sciences biologiques. Elle serait peut-être à compléter en s’interrogeant sur les raisons de l’absence ou de la présence de certains auteurs.

une désyncrétisation du savoir

Pour M. Verret auquel Y. CHEVALLARD dit avoir emprunté, « une transmission scolaire bureaucratique suppose quant au savoir la division de la pratique théorique en champs de savoirs délimités donnant lieu à des pratiques d’apprentissage spécialisées, c’est-à-dire à une désyncrétisation du savoir ».

En biologie, il en va de même. La pratique théorique que l’on trouve dans les laboratoires de recherche articule des domaines distincts qui concourent à un même objectif. Jean Bernard rappelle dans « Le sang de l’histoire » que l’étude du sang ne concerne pas seulement

la physiologie, la biochimie, la médecine, mais aussi l’anthropologie, la génétique et l’histoire. Sans évoquer une interdisciplinarité totalement absente des programmes à enseigner au lycée, remarquons que l’étude du milieu intérieur ou de l’immunologie en terminale ne font référence qu’à la biochimie ou la physiologie.

une programmabilité dans l’acquisition du savoir

Elle est la résultante des deux précédentes remarques.

« La programmation des apprentissages et des contrôles suivant des séquences raisonnées permet une acquisition progressive des expertises ».

Ainsi l’évolution apparaît-elle dans les savoirs à enseigner en terminale, même si très tôt des questions se posent à son propos. Ainsi cet élève qui, ayant observé à l’école élémentaire qu’un pied de haricot provenait d’une graine de haricot et posant la question : « mais comment est apparu le premier haricot ? », devrait-il d’après les programmes attendre bien longtemps pour avoir une réponse à sa question.

Pourquoi ? Entre autres parce qu’aux yeux du législateur l’évolution apparaît comme une théorie synthétique qui ne peut être abordée qu’en fin d’études secondaires.

Conclusion

Y. Chevallard a développé le concept de transposition didactique pour rendre compte de la transformation nécessaire opérée sur les savoirs retenus pour être enseignés avant que ces savoirs puissent effectivement être enseignés. Selon Chevallard, les savoirs enseignés sont renouvelés régulièrement, tant par leur formulation (règle de trois, opérateur, fonction linéaire, quatrième proportionnelle…) que par leur contenu.

Comment faire une transposition didactique ?

La transposition didactique interne et externe

Pourquoi la transposition didactique ?

Les 2 étapes de la transposition didactique

Sources :

  • Y. Chevallard ENSEIGNEMENT DE L’ALGEBRE ET TRANSPOSITION DIDAGTIQUE, IREM, Université de Marseille Luminy – Marseille, France. 15/12/1993
  • Michel Develay, A PROPOS DE LA TRANSPOSITION DIDACTIQUE EN SCIENCES BIOLOGIQUES, Ecole normale de Bourg en Bresse Equipe de didactique des sciences expérimentales, INRP.

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